A propos
Je suis né au milieu des années 80. J’ai le souvenir d’avoir toujours été intéressé par la photographie. Je n’ai probablement pas beaucoup de mérite dans le choix de cet intérêt : mon grand-père était directeur de la photographie chez France Soir et mes parents faisaient beaucoup de photos.
Depuis le cadeau reçu pour mon huitième anniversaire, un appareil jetable et un bon pour développement, j’ai toujours traîné un appareil avec moi.
A cette époque, la photographie était un rituel. Mon père m’emmenait souvent avec lui déposer un lot de pellicules chez Roger dans sa petite boutique du quai des grands Augustins aux couleurs de Kodak, Fujifilm et des pacotilles pour touristes.
Quelques jours après, nous récupérions les précieux cahiers de lecture. Les résultats pouvaient être inégaux (les flous étaient fréquents), mais chaque image était unique et faisait l’objet d’un regard appuyé.
C’est cet esprit que j’aime dans l’argentique et c’est pour cela que je continue de l’utiliser. J’aime la contrainte de la pellicule, l’incertitude de son résultat, le temps que prend son développement avant de révéler un cliché.
Un jour, j’ai appris que j’étais daltonien.
C’était un petit choc. J’avais 15 ans et je découvrais que ma vision des couleurs était altérée et que depuis toujours je ne voyais pas comme les autres. C’était très perturbant de m’en rendre compte aussi tardivement.
La couleur, c’était le domaine de ma mère, Béatrice Bonnafous, artiste-peintre dont une grande partie du travail et de la quête artistique est autour de la couleur. J’avais grandi dans son univers, du moins ce que j’en percevais, et tout à coup cet univers de couleurs se révélait ne pas être celui que je croyais.
Le noir et blanc m’apporte alors le réconfort de savoir que « tout le monde voit ces photos comme moi » et je plonge dedans à corps perdu.
Il m’a fallu longtemps avant d’oser me réapproprier les couleurs, exposer mon univers avec ce troublant décalage de perception et confronter ma palette chromatique à celle des autres.
Oscillant entre l’apaisement du noir et blanc et l’embarras de la couleur, j’essaie de vous faire partager « mon » univers.